Non, ils n’étaient pas morts et oui, ils l’ont fait ! Incroyable, indescriptible, phénoménale performance des joueurs de Hand de l’équipe de France qui conservent leur titre aux Jeux Olympiques. Après cet euro manqué de Janvier, comment revenir à un tel niveau, après tous ces titres, comment en vouloir encore et après toutes ces critiques comment parvenir à se remobiliser ?

LE MEILLEUR EXPLOIT DES EXPERTS HANDBALL

Je l’avoue, je n’imaginai pas cette équipe de France réaliser de grands Jeux Olympiques, surtout après avoir vu cette émission « mauvaise étoile d’intérieur sport » sur canal+, qui avait apporté de l’eau à mon moulin après l’article « 3 concepts pour comprendre ». Plus que le résultat de cet euro, c’était la manière, le contexte et leur situation qui m’avaient inquiété et jusqu’à aujourd’hui, je n’avais jamais vu une équipe revenir d’un échec comme celui-ci, surtout après avoir gagné autant de titres. Mais c’était sans compter sur leur volonté de réagir après cet affront, c’était mésestimer leur soif de victoires après 4 titres consécutifs et c’était également sous-évaluer leur confiance en eux. C’est lors de l’eurotournoi de Strasbourg en Juillet, tournoi préparatoire aux JO, que j’ai compris qu’ils avaient travaillé, qu’ils avaient fait de très gros efforts pour revenir au niveau avec un Thierry Omeyer et un Daniel Narcisse aux commandes de l’équipe contre l’Espagne qu’ils ont atomisée.

En général, quand on compte autant de titres et que l’on connaît un échec, c’est plutôt le déclin car l’envie de se faire mal n’est plus la même, le besoin de prouver que l’on est le meilleur n’est plus présent et la remise en question est plus difficile, alors qu’elle est nécessaire. Et très franchement, c’était plutôt mal parti en écoutant les réactions des joueurs qui restaient sur leur position, en regardant ces images canal+ d’un management hésitant et contredit, et des déclarations qui laissaient entrevoir une cassure. Messieurs, chapeau bas, je reste impressionné par cette performance. Encore une fois, plus que le résultat, votre attitude juste, digne et déterminée me laisse pantois. Avec la médaille d’or, c’est encore plus beau mais quel match contre les croates, quelle solidité, quel engagement. Même si ça s’était arrêté là, j’aurais salué votre parcours.

Les concepts de l’article cité ci-dessus sont simplement renversés. Ils ont su se mettre en stress de performance avec un nouveau défi à relever. Ils ont su résister à l’échec et à la réussite, ils ont su relever leur niveau de jeu en se remobilisant, ils ont su tenir la promesse qu’ils se sont faite. J’ai aimé cette remise en question collective avec ce changement de stratégie où cette équipe gagnait généralement avec son 7 majeur. Là, l’ensemble des joueurs est artisan de la victoire, y compris le 15ème homme qui rongeait son frein en tribune. Ca a été un formidable amalgame entre tous et un parfait ensemble qui laissait la place à l’expression individuelle à partir de ce collectif tout puissant.

COMMENT EST-CE POSSIBLE, COMMENT CETTE ÉQUIPE EST-ELLE PARVENUE À CRÉER CE NOUVEL EXPLOIT ?

Il n’y a qu’une explication et c’est l’occasion pour moi de présenter les différents stades de développement d’une équipe où seul le niveau de maturation le plus élevé permet de générer ce type de comportements. Ça, c’est à mettre au crédit de Claude Onesta qui est parvenu à l’instaurer avec cette qualité de joueurs et le savoir être de ces hommes. Un groupe ne devient pas une équipe performante du jour au lendemain. Il passe différents stades pour se développer. Différents modèles sont disponibles pour identifier à quel stade se situe une équipe afin de permettre son développement supérieur. L’équipe passe par 6 stades de développement, sachant que le passage d’une étape à l’autre correspond à un progrès.

Il est important de préciser que :

  • chaque étape est nécessaire dans l’évolution
  • plus on évolue et plus on accroît la richesse de fonctionnement de l’équipe et sa capacité à être performante.
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DANS LES STADES 1 ET 2

C’est le contexte d’une création de société, d’un porteur de projet ou d’un nouvel entraîneur qui devra construire une équipe et dont l’objectif est d’aider le système à se mettre en place, instaurer une synergie, un sens commun, une enveloppe culturelle minimale commune. Son rôle sera de définir un cadre de fonctionnement, de créer les conditions de collaboration idéales. Etant seul porteur de la vision, il sera le coordinateur, le seul décisionnaire de tout ce qui pourra être entrepris. Tout passera par lui, c’est l’homme-orchestre. Il est tentant de rester dans ce système qui peut paraître stable et garant de réussite. En effet, le chef a les manettes et peut ne pas souhaiter les lâcher.

DANS LES STADES 3 ET 4

Les collaborateurs, les coéquipiers vont commencer à s’exprimer, ils seront désireux de participer à l’élaboration des décisions et en ayant une vue précise de ce qui se passe sur le terrain, ils souhaiteront être impliqués dans le jeu et autres choix tactiques. Le rôle du manager sera de tenir compte des expressions de ses joueurs ou collaborateurs, de maîtriser les opérations et ne plus les mener, de motiver les initiatives et de solliciter les prises de décisions avec l’émergence de certains leaders mais il restera seul décisionnaire à la fin même s’il y a une collaboration. Le risque de frustrer certains est grand, c’est à ce stade d’évolution que l’on peut voir l’émergence de leaders informels, là ou d’autres pourraient jeter l’éponge si cela ne va pas dans le sens souhaité.

DANS LES STADES 5 ET 6

L’équipe a une identité claire, les joueurs et/ou collaborateurs communiquent librement et indépendamment, les interventions sont contrôlés par le groupe, le manager devient un chef d’orchestre, il stimule la créativité, rappelle les règles du groupe, il s’assure que chaque membre de l’équipe se soit approprié la vision et la respecte. Cette vision commune devient un élément de l’identité. On parle alors de vision holistique et d’égrégore ! Atteindre le dernier stade demande à ce que l’équipe innove pour s’adapter à son environnement et soit capable de remettre en question son mode de fonctionnement. On permet à ce niveau d’accéder à un sens, une expression personnelle que l’on partage collectivement… Tous les ingrédients de la puissance de l’équipe de France handball sont dans ce stade d’évolution. Ils ont su trouver les clés, en auto gestion, avec des valeurs, un but accepté et partagé de tous. (Plus d’infos sur ce rôle de manager ici)

Il est très difficile d’aboutir à un tel niveau, tant la connaissance, l’écoute, l’adaptation, l’intuition sont un travail quotidien et les obstacles nombreux sur cette route. Dans un premier temps, de la part du manager qui, par crainte de perdre le pouvoir, peut très bien ne jamais permettre l’épanouissement de son équipe, mais également, il faudra des gens de qualité, affichant une certaine maturité et une maîtrise du jeu pour convaincre le manager de leur faire confiance. Tout cela pourra se faire aussi avec une vision partagée de tous, une parfaite connaissance des uns et des autres mais surtout lorsque plus personne n’aura peur de se montrer tel qu’il est. On n’est pas les meilleurs quand on est tout beau et que l’on a plus rien à se reprocher mais plutôt lorsqu’on ne craint plus de se dire ce qu’on a à se dire et que l’on n’a plus rien à cacher à ses coéquipiers. A partir de là peut naître une identité de groupe forte qui sera le socle des performances à venir.

Lorsque les ingrédients d’une identité sont le respect d’un sport, la folie, l’abnégation, la culture de la gagne, le plaisir, l’amitié, la solidarité, etc.. et que cela se transmet de génération en génération depuis les années 90, initié par les premiers nommés, « les barjots », et que tout cela est entretenu de manière intelligente par des Hommes qui s’appuient sur cette richesse, ce vécu, pour dépasser les limites de ce qui est connu, le tout autour d’un management fédérateur, tout devient possible !!

Avec ma révérence,

Yohann Duclos